Henri Proglio, président-directeur général d'EDF, et Jean-Christophe Le Duigou, conseiller d'Etat, étaient auditionnés hier dans le cadre du débat national sur la transition énergétique. Sans surprise, ils se sont dits en faveur de la transition énergétique... tant que cela ne remet pas en cause le système énergétique actuel, l'occasion de quelques perles.
M. Proglio trouve contradictoire de parler de fermeture de nouveaux réacteurs alors qu'EDF va investir 55 milliards d'euros pour en allonger la durée de vie.
M. Proglio n'a pas souhaité répondre à notre question sur les bases de calcul de ces 55 milliards d'euros annoncés par EDF - sachant qu'entre 2004 et 2011 les chiffres sont passés de 400 millions par réacteur à 900 (sans post-Fukushima), que les prescriptions post-Fukushima ne sont pas encore définies et que les standards de sûreté pour l'allongement de durée de vie à 40 ans ne seront pas définis par l'ASN avant janvier 2015. En revanche, en cette période de crise, il trouve un argument étonnant pour justifier de ne pas fermer d'autres réacteurs que ceux de Fessenheim. Ne serait-il pas plus logique de se demander pourquoi dépenser au moins 55 milliards pour prolonger la durée de vie de centrales alors qu'on pourrait en fermer certaines et économiser ainsi des coûts d'investissements énormes qui seraient les bienvenus dans les énergies renouvelables et l'efficacité énergétique ?
Monsieur Proglio ne veut pas polémiquer sur le coût d'un accident nucléaire majeur . Il ne veut pas imaginer des risques qui n'en sont pas.
Pourtant, Claude-André Lacoste (ancien président de l'Autorité de Sûreté Nucléaire) indique que nul ne peut garantir qu'il n'y aura pas d'accident nucléaire en France. La réponse de M. Proglio est à rapprocher de l'obligation faite à EDF de provisionner seulement 91 millions d'euros alors que l'IRSN estime à plusieurs centaines de milliards d'euros le coût d'un accident majeur. La politique de l'autruche devrait donc perdurer.
M. Le Duigou ne croit pas à une baisse de la consommation d'énergie. Selon lui, si on parle de réduire la consommation d'électricité, alors on ne développera pas les énergies renouvelables. Ou alors il faudrait fermer plusieurs centrales, ce qui aurait un coût astronomique...
M. Le Duigou, membre du conseil d'Etat, semble ignorer les engagements pris par la France au niveau européen en matière de réduction de la consommation d'énergie. Par ailleurs, l'analyse des scénarios énergétiques dans le cadre du débat national sur la transition énergétique confirme que seuls ceux qui prévoient une réduction de la consommation d'énergie peuvent atteindre le facteur 41 d'ici à 2050, un autre engagement de la France pris cette fois-ci dans la loi POPE. Quant au coût astronomique de la fermeture des centrales, ne fallait-il pas l'anticiper, le provisionner ? Ne vaut-il pas mieux fermer au plus vite des réacteurs pour réduire ces coûts et ouvrir enfin la voie aux économies d'énergie et aux énergies renouvelables, seules solutions durables et davantage créatrices d'emplois ?
1Division par 4 des émissions de gaz à effet de serre