Tribune dans Médiapart
Les « conséquences économiques et sociales qu’aurait la mise en œuvre d'un “virage énergétique à la française” » sont positives, expliquent les ONG qui participent au débat sur la transition énergétique. Selon l'étude d'impact d'un économiste, le scénario de transition énergétique de l’Association d’experts indépendants négaWatt engendrerait une création nette de 235 000 emplois d'ici à 2020, notamment dans le bâtiment et les énergies renouvelables.
Menaces sur les raffineries, crise dans le bâtiment et l’automobile, fermeture de centrales nucléaires, problèmes dans les transports en commun, dépôts de bilans dans le photovoltaïque : l’actualité des dernières semaines impose de mettre l'emploi au cœur du débat en cours sur la transition énergétique voulu par le président de la République.
La question est centrale : quel pourrait être l’impact dans ce domaine de la mise en œuvre d’une politique ambitieuse en matière de réduction des consommations d'énergies par la sobriété et l’efficacité et de développement à grande échelle des énergies renouvelables, que les ONG et les associations du secteur de l’environnement appellent de leurs vœux ?
Aller au-delà des postures et des surenchères auxquelles peut conduire la crainte légitime de la destruction d’emplois existants, sans avoir de visibilité sur ceux qui seront créés, nécessite de disposer d’une analyse rigoureuse des conséquences économiques et sociales qu’aurait la mise en œuvre d'un « virage énergétique à la française » : c’est précisément à cette exigence que répond l’étude menée par Philippe Quirion, économiste, chargé de recherches au CNRS, publiée récemment.
Cette étude compare les impacts en 2020 et 2030 de deux scénarios contrastés : d'un côté le « tendanciel » qui prolonge les évolutions récentes et prend en compte les politiques déjà décidées, de l’autre le scénario de transition énergétique construit et rendu public en 2011 par l’Association d’experts indépendants négaWatt. Rappelons que ce dernier conduit à une division par deux dès 2030 des émissions de CO2 d’origine énergétique de la France et à une division par 16 en 2050, sans recours aux technologies incertaines telles que la capture-stockage du CO2, sans mise en service de nouvelles centrales nucléaires hors de prix et en fermant les centrales existantes après quarante ans d’exploitation au maximum.
Les résultats sont sans appel : la mise en œuvre du scénario négaWatt se solde par la création nette de 235 000 emplois en 2020 et de 632 000 en 2030, déduction faite des emplois détruits dans certains secteurs. Les créations d'emplois non délocalisables les plus nombreuses se situent dans le bâtiment grâce notamment à un programme massif de rénovation énergétique, et elles font bien plus que compenser le ralentissement de l’activité dans la construction neuve que l’on connaît actuellement. De même, les emplois créés dans les énergies renouvelables sont bien plus nombreux que ceux qui sont perdus dans les énergies fossiles et le nucléaire. En revanche, le solde s’avère négatif dans les transports, où le développement des transports en commun et du fret ferroviaire et fluvial ne compense pas complètement la baisse d’activité du fret routier, de l’aérien, des infrastructures routières et de l’automobile.
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