La fiscalité écologique, en donnant un signal prix clair, constitue un levier essentiel pour orienter efficacement les comportements et les investissements vers une consommation énergétique maîtrisée. La fiscalité écologique représente aujourd’hui moins de 5% des prélèvements obligatoires, et la France se situe au 26e rang européen en la matière.
La fiscalité écologique s’inscrit complètement dans la transition énergétique mais constitue également une réponse à la crise économique. Elle permet de dégager des ressources qui, mises à disponibilité de l’Etat et des collectivités, permettent de financer et de rendre accessibles à tous des alternatives moins consommatrices d’énergie (transports collectifs, travaux d'efficacité énergétique), mais aussi d’accompagner les ménages en fonction de leur vulnérabilité et de leur richesse (aide au financement des travaux de rénovation thermique par exemple). Ces dispositions doivent s’accompagner d’un rééquilibrage de la fiscalité indirecte pour orienter les usages vers des technologies, des biens et des services et des choix plus sobres en carbone et en énergie et ne pas accroître les prélèvements indirects globaux. En particulier il convient de réexaminer le dispositif fiscal et tarifaire de l’énergie et du carbone (TIPP, ETS, CSPE, tarifs progressifs) pour le rendre plus cohérent, incitatif et équitable pour tous. Les entreprises pourront alors économiser sur leur poste de dépenses énergie, au bénéfice de l’emploi et de l’innovation.
Si la pression fiscale doit être équilibré en fonction de ces critères sociaux et économiques, elle doit aussi augmenter avec le temps. La progressivité et l’assiette d’une mesure fiscale doivent être fixées dès son élaboration.
Dans sa situation actuelle, notre système fiscal encourage à la surconsommation de ressources et à la pollution. Chaque année, plus de 20 milliards d’euros sont accordés par le gouvernement français aux secteurs énergétiques les plus polluants, et tout particulièrement dans le transport, sous forme de subventions et exonérations fiscales diverses. Ces subventions nocives pour l’environnement vont à l’encontre du principe pollueur-payeur, et mettent à mal le respect de nos objectifs climatiques et environnementaux. Ces niches fiscales ou subventions dommageables à l’environnement, en maintenant un avantage compétitif aux secteurs les plus polluants, freinent l’essor des secteurs d’avenir, véritables viviers d’emplois pour les années futures.
Mesure phare : Dès le budget 2014, le gouvernement doit concrétiser au moins deux à trois premières mesures fortes et lisibles : en priorité, le rattrapage des taxes sur le diesel et la fin des exonérations diverses comme la taxation du kérosène utilisé pour les vols intérieurs. Ces mesures qui pourraient être utilement couplées à des "chèques mobilité" pour aider les ménages les moins aisés. Sur les années suivantes, c'est la généralisation du prix donné au carbone, aux consommations d'énergie et plus globalement aux atteintes à l'environnement qui doit être l'objectif, par une contribution énergie climat ou un mécanisme équivalent.
Plus en détails :
La contribution climat énergie est une fiscalité nouvelle et équitable basée sur la consommation d’énergie non renouvelable et les émissions de gaz à effet de serre. C’est un instrument clé pour réduire notre dépendance aux énergies fossiles et fissile, puisqu’elle permettra d’anticiper et d’éviter que la hausse inéluctable du prix de l’énergie ne soit subie, notamment par les catégories les plus modestes.
De par son effet incitatif, elle permet de diminuer significativement la consommation d’énergie et les émissions de gaz à effet de serre. Les travaux scientifiques de T. Sterner chiffrent son effet sur les carburants à 0,6% à 1% pour une hausse de 1% du prix.
Le niveau de taxation doit être relevé progressivement et régulièrement. La commission pluraliste de Rocard avait fixé le prix initial de la tonne de CO2 à 32€, un taux relevé de 4% annuellement pour atteindre 250€ en 2050. Au vu de l’urgence climatique et du retard accumulé par les politiques pour agir, c’est le minimum requis. La contribution climat énergie doit couvrir tous les gaz à effet de serre et à ce titre être étendue aux déchets et au secteur agricole.
La contribution climat énergie est une mesure incontournable des lois de finance à venir. Ses recettes, équivalentes à plus de 8 milliards d’euros, permettront de réaliser la transition énergétique tout en sortant de la précarité énergétique. Assortie de mesures redistributives sous conditions de ressources pour les plus modestes et de mesures de soutien et d’accompagnement pour faciliter la rénovation thermique et solutionner la mobilité contrainte notamment, elle n’affectera pas les ménages les plus vulnérables. En complément, un rééquilibrage fiscal devra être réalisé au travers d’une baisse de la fiscalité (TVA) des transports en commun, et de la fourniture d’énergie renouvelable. Plus largement, ces mesures contribueront au financement de la transition énergétique et à une politique incitative de réorientation des usages.
Corrélativement, pour élargir ces possibilités de financement, il est indispensable que l’Etat renforce la lutte contre l’évasion et la fraude fiscale dont les montants atteignent des dizaines de milliards d’euros par an, comme l’ont souligné les rapporteurs et membres de la commission d’enquête sénatoriale sur l’évasion des capitaux et la fraude fiscale.